Métavers : hype, usages concrets et limites

La promesse claque fort : « la prochaine révolution » à la hauteur du Web des années 1990 ou du smartphone des années 2000. Le mot d’ordre : métavers. Le symbole : Facebook qui se rebaptise Meta pour verrouiller le récit.

Hype ou bascule historique ; les deux récits s’entrechoquent. On démonte l’emballage ; on garde la substance. On sépare le rêve vendable du possible viable.

Rester lucide n’empêche pas d’être ambitieux, c’est même la meilleure façon d’y aller sans se perdre.

Récapitulatif

  • Le métavers agrège trois briques : jeux en ligne persistants, économie numérique via NFT, XR avec VR/AR.
  • Côté gaming : usages crédibles et audiences massives, les mondes persistants deviennent des places publiques.
  • Côté NFT : valeur surtout spéculative aujourd’hui, utilités concrètes en émergence pour les droits et memberships.
  • Côté VR : vision forte chez Meta, ergonomie, coûts et contenus « killer » encore immatures.
  • Contexte social et climatique : fatigue du réel, tentation d’un ailleurs, contraintes matérielles lourdes.

La prophétie qui revient chaque décennie

On nous a promis des imprimantes 3D dans chaque salon, des voitures 100 % autonomes, la fin des notaires grâce à la blockchain. Même l’homme bicentenaire a fait son apparition dans les slides.

La réalité avance ; mais rarement comme dans la démo. Règle d’or : méfiez-vous des visions sans friction ; l’adoption se joue dans les détails.

Le métavers n’échappe pas à cette loi : il doit convaincre par des usages, pas par des keynotes.

Tout le monde est équipé d'un casque de réalité virtuelle
Un tel futur est-il plausible ?

Généalogie express du métavers

Le terme naît avec Neal Stephenson en 1992 : fusion des mondes réel et virtuel ; moins « cyberespace » séparé, plus « synthèse » habitée.

Le choc 2020-2021 change l’échelle : confinements ; le numérique devient sociabilité par défaut. Le jeu persistant passe de passe-temps à scène culturelle.

« Le métavers représente une grande partie du prochain chapitre d’Internet ».

Mark Zuckerberg, PDG de Meta

La formule a enflammé l’imaginaire. Elle fixe une ambition ; elle n’efface pas les obstacles.

NFT : carburant spéculatif ; utilités en vue

Les NFT certifient la propriété d’un actif numérique singulier : le certificat est rare, pas le fichier. C’est un pont économique ; pas un cosmos unifié.

À court terme : marché surtout spéculatif ; effets de mode et retournements brusques. À moyen terme : tickets ; memberships ; royalties programmables ; identité portable ; utilités dans les jeux.

Le pont tient quand l’utilité dépasse la loterie ; sinon, tout s’effondre au premier doute.

Meta : storytelling XXL ; contraintes bien réelles

Mark Zuckerberg utilisant un Meta Quest MR
Mark Zuckerberg utilisant un Meta Quest MR

Meta revendique l' »Internet incarné » : une vision où l’on travaille, joue et socialise en 3D. La barre est haute ; l’ergonomie doit suivre.

« Ce qui se rapproche le plus d’un dispositif de téléportation ».

Mark Zuckerberg, PDG de Meta

Oculus a servi de tremplin ; la VR de salon n’a pas encore trouvé son moment iPhone. Les casques pèsent ; la cinétose guette ; la friction d’usage bloque l’adoption.

« Nous créons un monde virtuel qui sera un jumeau numérique du nôtre ».

Mark Zuckerberg, PDG de Meta

À quoi ça sert : vraiment

  • Jeux : crédible. Mondes persistants ; concerts ; marques ; économie créateur. Des usages concrets et une audience massive.
  • NFT : possible. Quand l’utilité l’emporte sur la spéculation ; quand l’UX, le juridique et l’impact environnemental sont traités.
  • VR/AR : en chantier. Sans confort, prix accessible et « killer app », on reste dans la niche.

Le « grand continuum » ne se décrète pas : il émerge par capillarité d’usages ; et par réduction de friction.

Ce que la hype dit de nous

Réseaux sociaux : sociabilité et estime de soi se rejouent en ligne ; pression accrue chez les jeunes. Confinements : nous avons vécu dans les bits ; puis tenté de revenir aux atomes.

L’expérience a laissé des traces. Climat : l’étau se resserre ; l’ailleurs numérique séduit comme soupape. Le métavers devient aussi une stratégie psychologique.

L’addition matérielle du virtuel

Le numérique est matériel : énergie ; eau ; métaux ; terres rares. La pénurie de semi-conducteurs l’a rappelé ; sécheresses et inondations coupent la chaîne à la source.

Même nos loisirs 2D saturent la bande passante : la 3D synchrone à grande échelle change d’ordre de grandeur. Sans monde matériel en bon état ; pas de monde virtuel à l’infini.

Et si on y était déjà : la tentation de la simulation

L’hypothèse de la simulation postule que notre « réalité » pourrait être un programme : différence de degré, pas de nature. Dans ce cadre : le métavers serait une simulation enchâssée.

Séduisant pour relativiser l’absurde ; dangereux si cela anesthésie notre rapport au réel.

Tableau récapitulatif des trois briques

BriqueCe que c’estMaturité actuelleObstacles principauxOpportunités court terme
Jeux en ligne persistantsMondes sociaux, événements, économie créateurÉlevée sur certaines plateformesModération, sécurité, interopérabilitéÉvénements, brand worlds, UGC monétisé
NFT / économie numériquePropriété programmable, tickets, membershipsMoyenne, usage mainstream limitéSpéculation, UX, cadre légal, impact environnementalUtilités concrètes, royalties, identité portable
VR/AR (XR)Interfaces immersives, spatial computingFaible à moyenne, niche passionnéeErgonomie, coûts, cybersickness, contenus « killer »Formation, collaboration 3D, expériences ciblées

Comment avancer sans perdre le réel : la feuille de route

  • Commencer léger :
    • Expériences web 3D sans casque
    • Partenariats sur des plateformes existantes
    • Réduire la friction
  • Privilégier l’utilité :
    • NFT comme droits d’accès
    • Perks
    • Royalties
  • Mesurer ce qui compte :
    • Rétention
    • Satisfaction
    • Sécurité
    • Empreinte carbone
    • Portée
  • Penser interopérabilité et souveraineté :
    • Assets portables
    • Contrôle de la donnée
    • Eviter le lock-in
  • Éthique by design :
    • Vie privée
    • Protection des mineurs
    • Modération
    • Accessibilité
    • Sobriété numérique

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Ce que les décideurs doivent retenir maintenant

Le métavers n’est pas un produit : c’est un patchwork d’usages en construction. À moitié plein si l’on choisit le verre, à moitié vide si on nous l’impose.

Construire sans aveuglement ; explorer sans s’aliéner : voilà l’équilibre. L’avenir se jouera dans les détails : ergonomie ; interopérabilité ; sobriété ; confiance.

Voulez-vous quitter et commencer une nouvelle partie ?

Bonne question, mais c’est à nous d’écrire les règles.

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